Magistratus Extraordinarius (Éditorial)

La république romaine antique avait l’option de donner un “magistrat suprême”, cad les pleins pouvoirs, à une personne – aussi appelée “dictator” – pendant une période n’excédant pas 6 mois, pour affronter un péril imminent. Ce magistrat suprême du dictateur était aussi accompagné d’une “joblist” qui cadrait plus ou moins clairement les taches à accomplir, par exemple :

  • faire la guerre (rei gerundae causa)
  • organiser des élections (comitiorum habendorum causa)
  • conduire des procédures judiciaires (quaestionibus exercendis)
  • etc. etc.

Le sénat romain (oui, c’était un acte parlementaire) a désigné une bonne 30 aines de dictateurs pour régler diverses problèmes avant de donner, plusieurs fois de suite une dictature à Jules Cesar. Celui-ci, après sa 3eme dictature, grosse surprise (haha), réussi aussi à obtenir du sénat pour sa 4eme dictature une “dictature à vie” (et oui, cette histoire n’est pas vraiment nouvelle). Celle-ci ne dura pas trés longtemps, cad jusqu’aux fameuses “Ide de Mars” (en -44) ou Brutus lui a fait son affaire (depuis, les dictateurs sont devenus paranos, on peut les comprendre), rajoutant “tu quoque, fili mi” à la longues listes de belles citations que vous pouvez trouver sur le web ou en lisant Asterix.

Son successeur, son neveu Auguste (chercher l’origine du mot “népotisme”, juste pour rigoler), se dit “wow, c’est pratique d’être dictateur” et sauta sur l’occasion pour transformer la république romaine en Empire, dont l’empereur devint, grosse surprise aussi : Auguste lui même. Et celui-ci, bien sur, commença d’abord par zigouiller tout ceux qui c’était pas d’accord avec cette décision.

Bref : depuis, tous les systèmes démocratiques ne se sont plus amusés à faire ce genre de conneries pour régler des problèmes, même de périls imminents, et ont établis des contre-pouvoirs et des limites de temps claires quand il est nécessaire de donner plus de pouvoir à une personne.

Dans la constitution tunisienne de 2014, le “dictateur provisoire” est le PdG, qui peut demander au parlement d’être investit d’une “dictature light” pendant 3 mois. Et après 3 mois, c’est au parlement de valider ou invalider les décisions que ce “dictateur intérimaire” a prit. Fakhfakh l’a fait pour contrer la crise du covid et a “de jure” été notre dictateur d’avril à juin 2020.

Bref : une dictature, c’est certes une option pour contrer un péril imminent mais aussi un danger de perdre très rapidement toutes les libertés et les droits. Et, même les “dictateurs eclairés” comme César ou Bourguiba, si ils perdurent, ne font que préparer le terrain à un Auguste ou un Zaba, bref, pour tous ceux qui attendent dans l’ombre, comme Iznogoud, de pouvoir sauter sur l’occasion de devenir calife à la place du calife.

Voila pourquoi la question principale à laquelle doit répondre, très vite, notre “Magistrat Suprême” Kais Said : Quel est la durée de ce mandat qu’il s’est auto-octroyé, comment compte-il le rendre et à qui …